La blanchisserie teinturerie Bourlière a été fondée en 1893 par Joseph Bourlière. Il a été secondé très tôt par son fils Barthélémy Bourlière, qui a pris sa succession en 1921.
Vue aérienne de la blanchisserie teinturerie Bourlière, 1969
L’entreprise emploie à l’époque des laveuses qui officient à l’aide des battoirs dans le Renaison. Barthélémy Bourlière a compris très vite qu’il était nécessaire de moderniser l’entreprise. A 16 ans, il se rend à Paris pour acheter sa première machine. Peu à peu il agrandit l’entreprise familiale. Les voitures à cheval sont progressivement remplacées par des véhicules motorisés, et la production se diversifie : dégraissage, teinture, location de linge pour les entreprises spécialisées.
Bien avant la mère Denis (lavandière devenue figure emblématique de publicités pour la marque de machines à laver Vedette durant les années 1970 et 1980), Barthélémy Bourlière a eu l’idée de « La Toinette », une laveuse qui lavait plus blanc que blanc et qui est devenue l’emblème de la blanchisserie (elle figurait en grandeur nature sur tous les véhicules de l’usine). Avec la Toinette, les dépôts se multiplient sur Roanne et dans le Roannais.
Une politique de logement pour le personnel est instaurée dès 1925. Dans les années 1960, Barthélemy Bourlière est secondé par ses deux fils : Jean Bourlière, alors directeur technique, et Marc Bourlière, directeur commercial. Les ouvrières professionnelles sont toutes formées à l’usine même, et l’entreprise a connu une expansion constante. En 1967, 42 ménages sont logés par l’entreprise. Un service de transport du personnel avec deux cars aménagés, un réfectoire, un foyer de jeunes filles (Clair Soleil), une société de Secours Mutuel usine sont mis en place. 280 personnes étaient alors employés à l’usine : 210 femmes et 70 hommes.
Atelier de nettoyage à sec, 1967
Atelier de blanchisserie, 1967
La blanchisserie teinturerie dessert à l’époque une aire géographique d’environ 100km autour de Roanne. A la fin des années 1960, on compte 52 magasins : 15 à Roanne, 10 à Saint-Etienne, 3 à Moulins, 1 à Saint-Chamond, Rive-de-Gier, Lapalisse, Tarare, Thizy, Charolles, Chauffailles, Gueugnon, Digoin, Renaison, Saint-Just-en-Chevalet, Feurs, Charlieu, Boën, Paray-le-Monial, Montbrison, Le Donjon, Marcigny... Et plus de 200 dépôts ! De nombreuses tournées à domicile permettent de servir la clientèle avec efficacité et rapidité.
On produit à cette époque environ 200 tonnes de linges par mois, dont 90 000 draps, 25 000 chemises, 30 000 vêtements nettoyés, 500 matelas, 400 oreillers ou traversins restaurés par an. 32 camions ou camionnettes de livraison assurent les transports. Les traitements nécessitent quant à eux l’utilisation de 800 000 litres d’eau par jour, 126 tonnes de lessive ou savon par an, 50 000 litres de solvant pour le nettoyage à sec, 4 tonnes de charbon par jour.
En 1969 l’entreprise installe un puissant groupe de nettoyage à sec avec un nouveau solvant : le trichloroéthane. Il s’agit de la première installation en Europe. Elle permet d’obtenir des vêtements parfaitement nettoyés qui conservent leur tenue et leur apprêt d’origine. Cette installation a été faite avec Rhône-Poulenc, Pechiney Saint-Gobain et Kuhlmann, dont les collaborateurs ont travaillé pendant 6 mois avec les techniciens de la blanchisserie.
De nouveaux services sont également lancés, aussi bien en blanchisserie qu’en teinturerie-nettoyage : réfection et entretien de literie, location de linge et vêtements aux hôtels, usines, administrations, réparation de chaussures et de vêtements, entretien et rénovation de cuirs et daims, nettoyage à domicile de moquettes et tapis. La silvification (procédé de nettoyage à sec au silicone qui permettait de rendre les vêtements résistants à l’eau et aux tâches, tout en restaurant leur éclat d’origine et évitant les plis) des vêtements, lancée dans les années 1960, connaît un grand succès.
Vue aérienne de la blanchisserie teinturerie Bourlière, 1969
L’usine fait en outre partie du groupement Uniblanc, formé par les 20 entreprises françaises de blanchisserie et de nettoyage à sec les plus importantes et les mieux organisées, dont le but est de promouvoir dans les entreprises adhérentes la notion de qualité. Chaque membre reçoit, s’il le mérite, le label Uniblanc, qui garantit une qualité totale. Ce qui a été le cas pour la blanchisserie Bourlière. Plusieurs organismes indépendants assurent constamment le contrôle de la qualité Uniblanc : le Centre de recherches textiles de Mulhouse et les Laboratoires de Joliet et Silver Spring (USA) et de Saint-Gallen (Suisse). Uniblanc organise également, dans toutes les régions de France, des stages de formation à l’intention des vendeuses. Elles deviennent ainsi des conseillères, capables d’orienter la clientèle et de donner un avis autorisé sur tous les problèmes qui leur sont posés.
Barthélémy Bourlière finira par céder son entreprise aux établissements Elis en 1973, après quasiment 80 ans de monopole.